Lettre d’information du SYFMER de septembre 2019 – Adhérer au SYFMER

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Avec les Propositions du SYFMER pour la réforme des autorisations, de la gradation et du financement des SSR

Les CPTS nouveaux monstres bureaucratiques ou opportunité de développement d’un exercice interprofessionnel coordonné ?

La nouvelle loi de santé révise en profondeur l’organisation territoriale tant en ville qu’à l’hôpital pour créer « un collectif de soins » de proximité au service des patients à l’horizon 2022.

En médecine libérale, le message est clair :  l’exercice isolé qui concerne un médecin sur deux doit disparaître en 2022. Les praticiens sont incités à s’engager quasi systématiquement dans un exercice collectif, au sein d’une maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), d’un centre de santé, d’une équipe de soins primaires, d’une équipe de soins spécialisés ou d’une communauté professionnelle territoriale (CPTS). La place des hôpitaux de proximité et des cliniques est incertaine dans ce nouveau dispositif destiné à estomper les cloisonnements entre prestataires institutionnels et libéraux. Nous avons évoqué dans la dernière newsletter la question clivante des assistants médicaux avec les opportunités et les risques.

La loi de janvier 2016 a défini l’équipe de soins primaires comme « l’ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins généralistes de premier recours, … qui contribue à la structuration des parcours de santé » (art. L. 1411-11-1, CSP). Les syndicats libéraux en particulier les SPE CSMF ont obtenu l’ajout dans l’article L. 1411-11-1 par la loi d’organisation et de transformation du système de santé, de « l’équipe de soins spécialisée » qui est « un ensemble de professionnels de santé constituée de médecins spécialistes » et qui, « contribue avec les acteurs de soins de premier recours à la structuration des parcours de santé ».

La loi de janvier 2016 avait aussi créé la CPTS, la « Communauté professionnelle territoriale de santé ». La CPTS est « composée de professionnels de santé regroupés, le cas échéant, sous la forme d’une ou de plusieurs équipes de soins primaires, d’acteurs assurant des soins de premier ou de deuxième recours, … et d’acteurs sociaux et médico-sociaux ». Notons que les établissements de santé ne semblent pas concernés, alors que les hôpitaux de proximité ont une vocation territoriale. De plus la mise en place de 135 GHT pour 3000 CPTS envisagées fait dire à certains que l’hospitalo-centrisme risque de s’accentuer. Le processus d’intégration-concentration décrit comme un scénario à risque par le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie est favorisé d’un part par le modèle des ACO promu par Natacha Lemaire (rapporteur général du conseil stratégique de l’innovation en santé) et d’autre part le modèle des paiements regroupés promus par le rapport Aubert.

L’accord conventionnel interprofessionnel sur l’exercice coordonné et les CPTS (arrêté du 21 aout sous ce lien) définit un peu mieux la gradation de la coordination de l’offre de soins. « L’exercice coordonné revêt deux dimensions : une coordination de proximité et une coordination à l’échelle du territoire. » (art. 2 de l’accord conventionnel). Le SYFMER propose de s’engager avec lucidité dans les CPTS afin que la MPR soit partie prenante de la coordination des parcours de réadaptation.

Dans une prochaine newsletter nous évoquerons la télémédecine, la réforme du DPC et la question des retraites.


Rémunérations des médecins libéraux

Contrairement à d’autres disciplines, la MPR ne souffre ni d’érosion démographique, ni de déficit d’attractivité. Toutefois on peut craindre une diminution du nombre de MPR libéraux liée aux départs en retraite non remplacés.

La MPR figure parmi les spécialités cliniques dont l’acte intellectuel et les consultations complexes ne sont pas reconnus par rapport aux spécialités techniques dont les actes assurent une meilleure rémunération.

L’action conventionnelle qui vise à obtenir les 4 niveaux de consultations demandés par de nombreux syndicats n’aboutit pas pour le moment.

La description de programmes de soins pertinents pour les cliniciens comme pour l’assurance-maladie et associant en épisodes de soins plusieurs actes ou interventions successives doit être encouragée. Il nous faut initier une dynamique collective allant dans ce sens.

Cette démarche de description des programmes correspond à une évolution internationale des rapports entre médecine et organismes payeurs dans un dialogue de pertinence des soins entre cliniciens et assurances maladie.

http://www.carmf.fr/page.php?page=chiffrescles/stats/2019/bnc2017.htm

 


La MPR face à la réforme des autorisations et du financement en SSR

Propositions du SYFMER pour la réforme des autorisations et du financement

Le SYFMER participe activement, au sein du CNP de MPR, aux travaux relatifs aux autorisations, à la réforme du PMSI-SSR et à celle de la classification à visée tarifaire en SSR. Le SYFMER appelle à un pilotage cohérent de ces trois chantiers qui ne peuvent être dissociés. Voici nos propositions :

Une définition claire de la réadaptation au sein des finalités principales des SSR

La plupart des pays étrangers ont défini les fonctions de production de leur secteur hospitalier post-aigu. Cette définition est un préalable indispensable à tout financement à l’activité. Les SSR, issus des « moyens séjours », n’ont pas réussi à spécifier ces fonctions ni les activités homogènes qui les constituent autrement que selon les catégories majeures diagnostiques de l’aigu. Leur rôle reste mal défini entre fluidification de l’amont et pertinence des hospitalisations dans des domaines d’activités spécifiques des SSR. En outre, dans la plupart des pays industrialisés on distingue dans les secteurs post-aigus des établissements hospitaliers (rehab centers) qui délivrent des soins de réadaptation médicalisés et intensifs et des maisons médicalisées (nursing homes) qui délivrent des soins infirmiers et de réadaptation de moindre complexité et intensité. En France, un regroupement artificiel et trop peu différencié a créé un secteur institutionnel post-aigu des plus hétérogènes réunissant 25% des lits et places hospitaliers.

Il faut donc identifier les trois grandes fonctions de production des SSR conformément aux définitions et nomenclatures internationales (OMS, ICHA)[1] :

  • Les soins curatifs prolongés ou subaigus (HC.1)
  • Les soins de réadaptation visant l’optimisation des fonctions (HC.2)
  • Les soins d’assistance aux activités de la vie quotidienne (HC.3).

Une description précise des missions et des moyens minimums des prestataires

Aucun système d’information au monde ne sait classer les patients en fonction des ressources requises par ces trois fonctions fondamentales pour l’ensemble des prises en charge de SSR a fortiori pour la durée entière du séjour et pour un ensemble d’activités aussi hétérogènes. Le premier nœud de l‘arborescence d’une classification SSR repose donc sur le diagnostic médical de réadaptation, étayé par une évaluation pluridisciplinaire, qui oriente le patient vers des prestataires et des niveaux de soins différents. La pertinence des orientations peut être évaluée.

Les catégories majeures de diagnostics ne sont pas adaptées pour définir les domaines de prestations homogènes en SSR. La nature, l’intensité et la complexité de la réadaptation doivent être la clé de la spécialisation et de la gradation des soins[2]. Un financement à l’activité suppose la description précise des conditions d’implantation et de fonctionnement, notamment les compétences requises et des temps minimums de rééducation-réadaptation pour chaque domaine, polyvalent ou spécialisé.

La MPR qui est en position de coordination en SSR locomoteur, système nerveux et brûlés doit pouvoir, sous réserve d’une compétence attestée, être en position de coordination en réadaptation cardiaque, respiratoire, onco-hématologique et pédiatrique, le soin curatif n’étant pas la finalité principale de ces activités.

La gradation des niveaux de soins doit épouser la technicité requise par les groupes de patients proches et leur prévalence, plutôt que selon les catégories curatives et les pathologies. Dans tous les pays l’intensité et la complexité de la réadaptation sont la clé de la gradation technique et territoriale des soins post-aigus.[3]

Une réforme radicale du PMSI-SSR pour mieux décrire les besoins des patients

  • La fréquence de description des données, aujourd’hui trop élevée, doit permettre de distinguer sous forme de séquences cliniquement significatives les changements importants de besoins relatifs aux trois finalités principales.

Le diagnostic n’a pas de pouvoir prédictif des ressources consommées en SSR.

  • La nature et l’intensité des traitements de réadaptation doivent être testées en premier dans l’arborescence de classement.
  • Le poids des comorbidités doit être mieux capté par des scores de comorbidité.
  • Le niveau des aptitudes fonctionnelles doit être évalué par un outil robuste et validé : MIF, MAF, SMAF, RAI, coresets de la CIF, section GG aux USA… Notons que le Score d’activités de la SOFMER (SAS) est en cours de validation.
  • Un paiement par cas s’appuie sur les caractéristiques décrites au début de l’épisode de soins qui sont des inducteurs de coûts plutôt que sur la mesure de ressources consommées par des unités d’œuvre (CSARR ou temps de rééducation), hormis pour certains actes traceurs.
  • A défaut, une simplification radicale du CSARR ainsi qu’un recentrage sur quelques métiers spécifiques des thérapies de réadaptation s’imposent.

Une classification fondée sur des séquences cliniquement significatives

Une classification par cas définit des groupes de patients dont les prises en charges sont cliniquement significatives et utilisent des ressources diagnostiques et thérapeutiques semblables. Le système d’information actuel n’a pas les prérequis pour un paiement par cas.

  • La séquence permet de segmenter un séjour en phases cliniquement significatives, mieux à même de porter un financement à l’activité (Rode 2013)[4]
  • La séquence répond mieux que le séjour aux risques de rentes de situation ou d’information, très différents selon les établissements, les secteurs et les territoires. Ces risques sont liés à la diversité des contraintes d’amont et d’aval, ainsi que des déterminants de l’hospitalisation mal captés par le système d’information comme les facteurs socio-environnementaux.

Seul un paiement à la journée pondérée et séquencé est applicable. En outre, il est aujourd’hui impossible d’appliquer des tarifs forfaitaires uniformes pour tous les SSR du fait des limites du système d’information et de l’hétérogénéité extrême du secteur.

Un scénario « au fil de l’eau », ne modifiant qu’a minima les autorisations et le pouvoir descriptif du PMSI-SSR, entrainerait le rejet persistant par les acteurs d’un modèle prospectif par cas traité applicable uniformément à tous les SSR. S’il est imposé, il aboutira à un lissage du financement des SSR vers le coût moyen de prise en charge, interdisant de rémunérer le juste soin au juste coût, fragilisant la qualité des prises en charge, de la formation et de la recherche développées en SSR et en MPR en particulier.

Un scénario de spécification des activités implique un pilotage politique cohérent de la réforme des autorisations et du système d’information. Cette démarche peut aboutir à un financement pertinent pour les prestataires et pour les financeurs.

La mise en œuvre de paiements regroupés est à l’étude mais suppose une restructuration préalable par intégration verticale d’une offre de soins très fragmentée. L’objectif des financements à l’activité est que l’argent suive les besoins du patient. Quel que soit le modèle choisi pour le financement à l’activité, Il ne doit pas mettre en concurrence les acteurs du parcours au détriment de sa coordination.

Fig. 1 : Une classification fondée sur des séquences cliniquement significatives

Adapté de Gilles Rode et all. 2013

Jean-Pascal Devailly, président du SYFMER, le 15 mai 2019

jpdevailly@gmail.com

https://www.syfmer.org/

[1] Devailly JP. SSR et réadaptation – Organisation et financement. Cadre conceptuel et comparaisons internationales. Revue Hospitalière de France. Juillet Août 2019

[2] Propositions et exemples pour la gradation des soins dans le domaine de la réadaptation du système nerveux et de l’appareil locomoteur : sous ce lien (CNP de MPR)

[3] Devailly JP SSR : quels outils de description fine pour porter le financement de demain. A paraître. Revue Hospitalière de France. Septembre Octobre 2019

[4] Rode G et al. Financement SSR Pour un modèle reposant sur la Classification internationale du fonctionnement. Revue Hospitalière de France. Décembre 2013.